Lutte contre les migrations clandestines par le biais de l’école
En partenariat avec le bureau de l’Envoyé spécial de l’Union Africaine pour la jeunesse, le Mouvement des Leaders Africains (MPL) a organisé un forum à Nouackchott (Mauritanie) du 16 au 21 décembre 2019, sur le thème: les migrations clandestines de la jeunesse africaine: quelles solutions? Le forum a réuni des dizaines de jeunes venant de seize pays africains.
Invitée au forum, Katy Dieng, présidente de l’association Esprit Sud, est intervenue sur la problématique suivante: comment l’école pourrait-elle contribuer à la lutte contre les migrations clandestines?
La question des migrants est grandement abordée par la présidente d’Esprit Sud, dans le souffle des malvacées, pièce de théâtre en trois actes, parue en 2018 aux éditions de l’Onde. A travers un dialogue entre Vieil Adansonia, le baobab centenaire et Enfant, de retour au pays natal, les malheurs en Méditerranée sont analysés. Qu’est-ce qu’un migrant ? Enfant le décrit comme un être insignifiant dont la mort ne touche pas la conscience des mondes, un homme à qui l’Afrique n’offre pas de sépulture. Enfant se proclame alors Antigone, décidée à honorer la mémoire des noyés. L’auteure peint également à travers les migrants la rage des pauvres qui refusent d’être réduits à des morts qui respirent et prédit les germes de la révolte qui monte et menace d’exploser si aucune solution n’est trouvée.
Pour trouver des solutions face au phénomène de la migration clandestine, Katy Dieng a procédé à une enquête visant les migrants clandestins vivant en France, Allemagne, Italie et Espagne. L’échantillon, 100% masculin, comptait une centaine de migrants, originaires principalement du Centre du Sénégal, plus particulièrement de la région de Louga. Une population à la base vivant d’agriculture et de commerce et dont une bonne partie des enfants n’a jamais été scolarisée à l’école française. La plupart sont d’anciens élèves de daaras (écoles coraniques). Il s’agit d’une émigration économique.
Les migrants ont abordé la difficile traversée, les difficultés rencontrées une fois en Europe, le traumatisme et leur détermination à ne pas retourner au Sénégal avant d’avoir réussi.
Madame Dieng a ensuite exposé les solutions proposées par les migrants eux-mêmes, entre autres, la nécessité de la formation professionnelle, la nécessaire reconnaissance des élèves de l’école coranique par l’Etat, la sensibilisation par les réseaux sociaux, le recrutement des meilleurs élèves comme professeurs dans les internats coraniques, l’apprentissage du français après la mémorisation du Coran, etc.
Katy Dieng a terminé par les solutions préconisées par Esprit Sud comme le partenariat établi entre l’association et ses partenaires afin que des jeunes soient recrutés et formés aux métiers tels que le tissage et teinture (école au Burkina Faso), l’agriculture bio (ferme à Dakar), les ateliers de sensibilisations dans les écoles, l’agro foresterie, etc. Pour elle, l’Ecole de demain, projet phare de son association devra être une école inclusive répondant aux besoins actuels de la société africaine, une école dans laquelle tous les enfants pourront trouver une place et apprendre, exceller dans ce qu’ils aiment, dans la langue qu’ils comprennent, à travers une pédagogie adaptée, avec la participation de l’Etat et d’acteurs privés.
En conclusion, Madame Dieng a rappelé que les migrations existeront toujours mais que la migration clandestine n’est pas une fatalité. Certes, aussi longtemps que les inégalités subsisteront, les gens chercheront toujours à aller du côté où penche positivement la balance mais un rééquilibrage des richesses, des rapports plus justes entre le Nord et le Sud et le militantisme des jeunes pour un monde plus juste, l’application des solutions proposées, permettront de limiter la clandestinité.
@Espritsud_afrique