La daara de Coki : une institution scolaire en avance sur son temps
Institut Islamique Ahmed Sakhir Lô de Coki : des infrastructures modernes – un système scolaire en avance sur son temps – une totale gratuité pour les 4000 élèves de l’institut.
Le plus grand institut islamique du Sénégal se trouve à Koki, dans la région de Louga, à 224km de Dakar ou encore 103km de Saint-Louis. Fondé en 1939 par serigne Ahmed Sakhir Lô, l’institut accueille près de 4000 élèves et leur offre une scolarité entièrement gratuite, étalée sur plusieurs années.
A sa fondation en 1939, l’institut n’était composé que de quelques cases en paille. Au fil des ans, sous l’impulsion de l’actuel directeur, serigne Makhtar Lô, l’institut a connu un processus de modernisation rapide, devenant aujourd’hui un véritable campus à l’américaine: nombreux bâtiments ultra modernes, dortoirs pour élèves et étudiants, amphithéâtre, salles de réunion, villas pour le personnel, laboratoire de sciences, immense salle informatique, résidences de luxe pour invités, grande bibliothèque, salles de classe équipées d’un vidéo-pro. La daara dispose également de son propre hôpital, d’un forage pour l’approvisionnement en eau, d’un groupe électrogène pour remédier aux coupures d’électricité, d’une très grande mosquée.
Outre les infrastructures et équipements, la daara de Coki a mis en place un modèle scolaire unique, alliant enseignement coranique, enseignement arabe et enseignement général « français ».
L’étape initiale pour tout élève réside dans la mémorisation du Coran. Une fois le Coran récité, l’élève débute l’apprentissage de l’école “française” (cursus normal accéléré) ainsi que l’arabe et les sciences islamiques. L’élève effectue l’école primaire en trois ou quatre ans au lieu de six, le collège en trois ans au lieu de quatre, le lycée en trois ans. Les résultats au brevet et bac de français font partie des meilleurs au plan national.
Les élèves ayant obtenu le Bac peuvent ainsi poursuivre des études supérieures en français ou en arabe avec possibilité pour certains d’obtenir des bourses d’étude à l’étranger.
En 2019, 1/5ème des élèves de l’institut a terminé la mémorisation du Coran et entamé le cursus scolaire classique.
Afin de lutter contre le chômage et les migrations clandestines, l’institut met en place un centre de formation professionnelle permettant aux élèves d’apprendre un métier.
Les élèves participent également au concours général organisé par l’Etat Sénégalais et récompensant les meilleurs élèves du pays.
Ce système scolaire mis en place prouve que l’enseignement religieux est compatible avec la modernité et n’exclut pas l’enseignement général. L’institut permet à ses élèves d’obtenir les mêmes chances, voire plus, que ceux qui poursuivent le cursus scolaire traditionnel. Il permet de combler les attentes de milliers de parents pour lesquels l’enseignement coranique est essentiel tout en offrant aux enfants la possibilité d’entrer dans l’enseignement classique français, cet autre monde qui leur était fermé.
Dans un contexte national dominé par le dialogue sur la modernisation des daaras, la daara de Coki peut servir de modèle puisqu’elle permet d’unifier le système scolaire sénégalais jusque là marquée par la dichotomie, voire l’antinomie entre l’école coranique « informelle », non reconnue par l’Etat et l’école française « formelle ». Ce système mis en place par la daara de Koki révolutionne ainsi l’enseignement religieux classique en lui permettant de se conformer aux exigences de la République sans se renier et de s’adapter à la modernité à travers des infrastructures, équipements et méthodes d’apprentissage dignes de pays développés.
Ndèye Katy Dieng